Voter NON ? Notre bon droit

Sous diverses formes, les partisans du OUI mettent en question notre droit, le droit des citoyennes et citoyens de Vevey, de dire NON le 3 mars, notamment en nous promettant d'importants dédommagements à payer à Projet109 SA, du fait que «le promoteur n'est pour rien dans la situation actuelle».

Le terme de «droit» peut ici être pris sans deux sens : droit… en droit, et droit en morale.

1. Au sens du droit, c'est le texte de la promesse de vente et d'achat qui fait foi. Il vaut la peine d'en relire (ou peut-être pour certains d'en lire) le texte, en son point VI (page 9) [1]:

VI.- NULLITE – ECHEANCE

Compte tenu des dispositions qui précèdent, le présent acte sera considéré comme nul et non avenu, sans indemnité de part ni d’autre:

- en cas de refus par le Conseil communal de Vevey de ratifier l’une ou l’autre des propositions qui lui auront été soumises par la Municipalité en application des dispositions du présent acte (crédit d’étude pour l'établissement du plan partiel d’affectation, légalisation de ce plan, vente de l’immeuble promis-vendu),

- si les autorisations délivrées par le Conseil communal ne sont pas ratifiées par le corps électoral dans la mesure où une procédure référendaire est intentée avec succès,

- dans les 20 jours après notification d’un jugement du Tribunal administratif refusant à l’acheteur la délivrance du permis de construire sollicité,

- le 31 décembre 2012 au plus tard si les conditions de l’obtention du permis de construire ne sont pas remplies à cette date; toutefois, si des oppositions ou interventions ont été formulées à l’encontre du projet mis à l’enquête, l’échéance ci-dessus sera automatiquement prorogée jusqu'à droit connu sur le sort de celle-ci.

Comme on le voit, la phrase «le présent acte sera considéré comme nul et non avenu, sans indemnité de part ni d’autre» vaut pour tous les points qui suivent, sans nuances ni exceptions. Il n'est notamment nulle part question de faute de l'une ou l'autre partie. Que Projet109 SA y soit pour quelque chose ou pas n'y change donc rien.

Si le conseil communal, ou le peuple, refuse le crédit pour le PPA, le PPA lui-même, ou la vente définitive [2]; si le Tribunal administratif [3] refuse de délivrer le permis de construire; si, pour une quelconque autre raison, «les conditions de l’obtention du permis de construire ne sont pas remplies à cette date» du 31 décembre 2012; dans tous ces cas, la promesse de vente est annulée «sans indemnité de part ni d’autre».

Les partisans de Projet109 SA tentent aujourd'hui de relativiser cette dernière clause en prétendant qu'elle a spécialement été prévue pour que le promoteur ne puisse pas acheter, puis laisser traîner et ne rien construire. Cela se peut, mais ce n'est pas dit dans le texte. Et c'est bien au texte qu'il faut s'en tenir, et non à ce que les signataires disent aujourd'hui de leurs intentions d'hier.

Enfin, les partisans de Projet109 SA laissent entendre que la commune pourrait être considérée comme responsable du retard, parce qu'elle n'aurait pas rempli ses engagements à l'égard de l'acheteur. La seule mention qui pourrait aller dans ce sens se trouve au chapitre V de la promesse de vente (page 8).

V.- ENGAGEMENTS DES PARTIES / 1.- Engagements du promettant-vendeur / Le promettant-vendeur s’engage à déposer le plus rapidement possible sur le bureau du conseil communal les divers préavis relatifs aux procédures d’autorisations réservées ci-dessus […].

Il est facile de montrer que sur tous les points prévus (crédit pour l'établissement du PPA et PPA), la partie communale est allée aussi vite qu'elle le pouvait, et que la durée des procédures est due à des interventions extérieures (délais de traitement par les services cantonaux, décision du Tribunal cantonal), dont elle ne peut en aucun cas être tenue responsable.

La seule étape non prévue à l'origine est le concours d'architecture pour la Salle del Castillo, cause principale du dépassement de délai. Si le promoteur parvenait à prouver que ce concours n'était pas nécessaire, et que donc, en prenant la décision de le lancer, la Municipalité a retardé inutilement le moment du dépôt du préavis sur le PPA, il pourrait alors faire jouer cette clause. Heureusement pour la commune, on peut montrer que tel n'est pas le cas, que le projet présenté concernant la Salle del Castillo – bricolé pour la votation – en 2007 ne permettait pas une rénovation convenable, qu'on était dans une impasse et qu'il était nécessaire d'organiser ce concours pour en sortir. De plus, Projet109 SA a participé au jury du concours, il l'a donc reconnu comme légitime, et ne peut aujourd'hui le renier.

Nous avons donc pleinement le droit, au sens juridique, d'utiliser la clause de nullité au 31 décembre pour écarter un projet que nous jugeons néfaste pour Vevey, et pouvons le faire sans craindre de devoir payer les dédommagements dont on nous menace.

Evidemment, il faudra que les procédures juridiques qui suivront un NON – s'il y en a – soient menées par des juristes convaincus du bon droit de la commune et du peuple, et non par ceux qui ont jusqu'à présent argumenté le contraire !

2. Sous la forme du «respect des engagements», les partisans du OUI mettent en cause notre droit moral à user de ce droit.

Un premier facteur relativise cet «engagement», c'est l'ambiguïté sur la nature même de l'acte «promesse de vente et d'achat». Une partie de la population a pu croire qu'approuver cette promesse n'engageait à rien de définitif, qu'elle devrait être confirmée par la suite. C'est d'ailleurs en ce sens qu'avait écrit au groupe socialiste le municipal Pierre-Alain Dupont. [4]

Deuxième facteur, l'état de «nécessité» et le chantage: l'impasse concernant le château de l'Aile était telle, l'exaspération contre ce feuilleton tragicomique, avec ses grands espoirs, et ses déceptions non moins grandes, ses fragments de molasse amenés par l'un ou l'autre conseiller communal en séance, avait atteint un tel niveau, que pour beaucoup il ne pouvait être question de faire la fine bouche, de risquer que la solution entrevue disparaisse à nouveau. C'est pourquoi, face au chantage de Projet109 SA «ce sera le Château ET le Rivage ou rien», la proposition de dissocier les deux ventes faite par la majorité de la commission n'a pas fait le poids au Conseil communal. Quant à la population, elle avait encore moins de marge de manœuvre : elle ne pouvait pas dissocier les deux ventes et devrait répondre par un seul OUI ou un seul NON aux deux questions. L'effet de chantage jouait encore plus fortement.

Troisième facteur : dans la campagne de votation, le sujet du Château de l'Aile a éclipsé les autres aspects du dossier. Le vote, à tort ou à raison, est devenu un choix entre sa vente et sa rénovation d'un côté, et de l'autre une proposition de maintien en main publique, sans projet d'utilisation concrète crédible et convaincant. C'est avant tout sur cela que le peuple a voté. Pour avoir essayé durant toute la campagne d'abord de comprendre le projet de rénovation de la Salle del Castillo présenté alors [5], puis d'avertir sur ses conséquences désastreuses, nous sommes bien placés pour savoir à quel point il était difficile de discuter d'autre chose que du Château de l'Aile.

Ainsi donc, entre ambiguïté de l'acte de vente, impossibilité de donner une bonne réponse à une question «multipack» et manque de discussion sur la vente du Rivage, il y a passablement de mauvaise foi à prétendre que la population a pris en 2007 un engagement clair et conscient !

D'autre part, Projet109 SA n'a pas hésité en 2007 à profiter de l'état de faiblesse de la commune sur ce dossier pour obtenir ce qu'il voulait. Aucune raison d'avoir aujourd'hui des scrupules à profiter de l'occasion qui nous est offerte pour nous dégager de ce qui était et reste un mauvais projet pour Vevey.

 

1. On trouve les mêmes points au chapitre IV-Conditions, sans rien qui contredise le chapitre VI.

2. Déjà acquise dans les faits, voir Juste retour du deuxième vote qu'on nous a volé (21 novembre 2012).

3. Aujourd'hui Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal, celle qui a annulé le PPA.

4. Voir Juste retour du deuxième vote qu'on nous a volé (21 novembre 2012)

5. Comme rappelé ci-dessus, le concours d'architecture a bouleversé le projet présenté pour la votation de 2007.

 

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